Les dispositifs du droit électoral belge face aux nouvelles réalités des campagnes électorales : Le cas des réseaux sociaux

Justine Décolle
Assistante au Centre de recherche sur l’Etat et la Constitution, Université de Louvain 
Valentin Speleers
Assistant au Centre de recherche sur l’Etat et la Constitution et au Centre interdisciplinaire de recherches constitutionnelles, Université de Louvain

La présente contribution s’intéresse à l’effectivité des règles en droit belge qui encadrent les partis politiques durant la campagne électorale, au regard de l’utilisation des réseaux sociaux. L’étude s’intéresse plus précisément à deux mécanismes. Dans un premier temps, la contribution s’intéresse à l’impact des réseaux sociaux sur les règles relatives à la limitation des dépenses de propagande électorale (transparence, effectivité, évolutions potentielles). Dans un second temps, après avoir exposé le mécanisme du cordon sanitaire médiatique appliqué dans les médias audiovisuels relevant de la compétence de la Communauté française, la question de la transposition du cordon sanitaire médiatique sur les réseaux sociaux est étudiée.

The use of social media during the electoral process is a growing phenomenon which has non negligeable implications on democracy. This paper seeks to analyse two Belgian mechanisms that regulate political parties during the election campaign. It first focuses on the limitation and control of the electoral expenses – with reference to the relevant Belgian law provisions – and on the impact of the use of social media, before imagining possible solutions, based on recent bills. In its second part, the article discusses the “cordon sanitaire médiatique”, a mechanism that aims to prevent the live diffusion of far-right political parties in the French-speaking audiovisual media, and on the opportunity to use such a mechanism on social media platforms.

A l’instar de toutes les personnes physiques et morales qui s’expriment dans l’espace public, les partis politiques disposent désormais de la possibilité de transmettre leurs messages en utilisant les plateformes numériques organisées sur les réseaux sociaux. Cette possibilité existe aussi pour les candidates et les candidats qui, au moment des élections, se présentent sur les listes déposées par les mêmes partis politiques.

Si cette « numérisation » des campagnes électorales recèle d’indéniables atouts sur le plan de l’accessibilité de l’information politique, elle n’en est pas moins problématique au regard des règles encadrant le fonctionnement des partis politiques. En effet, ces dernières décennies, plusieurs dispositifs normatifs ont vu le jour en Belgique pour organiser les campagnes électorales menées par les partis politiques et par celles et ceux qui se présentent sous l’égide de ces partis. Ces dispositifs ne sont pas toujours bien adaptés à l’incursion des réseaux sociaux dans les campagnes électorales. C’est notamment le cas de deux dispositifs : un dispositif législatif relatif à l’encadrement des dépenses de propagande électorale et un dispositif, cette fois non législatif, connu sous le nom de « cordon sanitaire médiatique ». C’est essentiellement l’effectivité de ces dispositifs qui est mis à mal par les nouvelles possibilités offertes par les plateformes numériques.

L’avis du Comité scientifique

L’étude réalisée par Justine Décolle et Valentin Speleers met en évidence l’impact des nouvelles technologies, et plus particulièrement des réseaux sociaux, sur l’organisation des campagnes électorales. A l’instar de toutes les formes modernes de numérisation de la société, l’émergence des réseaux sociaux au cœur des campagnes électorales comporte d’indéniables atouts, mais elle produit aussi des effets inquiétants ou pervers. Dans le souci de ne pas se disperser vainement, les auteurs se concentrent sur le dispositif (législatif) d’encadrement des dépenses de propagande électorale et sur le dispositif (non normatif) dit « du cordon sanitaire médiatique ». Ces deux thématiques sont traversées par des enjeux cardinaux, liés à la démocratie et à l’Etat de droit.

Marc VERDUSSEN

Professeur de droit public à l’Université Catholique de Louvain

La présente contribution entend à la fois mettre à plat ces questions et mettre en avant quelques pistes de solution. Le sujet revêt une actualité brûlante dans la mesure où l’année 2024 rime en Belgique avec deux ‘Super Sundays’. Le 9 juin 2024, les élections de la Chambre des représentants et des Parlements fédérés ont été couplées avec les élections au Parlement européen. Quatre mois plus tard, le 13 octobre 2024, les électrices et les électeurs ont été convoqués pour élire les conseils provinciaux et communaux.

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